Les recommandations de restriction des apports en lipides des années 1980, à l’origine de la stigmatisation des graisses, ne reposaient sur aucune preuve scientifique. Depuis 1977 et 1983, les comités experts américains et anglais préconisaient en effet que les lipides totaux et les acides gras saturés représentent respectivement 30% et 10% de l’apport énergétique total… mais les données scientifiques disponibles à l’époque ne justifiaient absolument pas ces recommandations. L’objectif de cette étude était d’analyser les bases scientifiques sur lesquelles reposaient les recommandations en acides gras émises par les gouvernements américains (1977) et anglais (1983). Pour ce faire, les auteurs ont réalisé une méta-analyse des essais d’intervention randomisés disponibles à l’époque qui proposaient de tester l’efficacité d’une alimentation contrôlée en lipides et/ acides gras saturés.
Six essais menés avant 1903 inclus dans cette méta-analyse. Ils reposaient sur la même méthodologie. Les populations étudiées étaient des hommes, pour la plupart déjà malades (5 études sur 6 ont été réalisées dans le cadre d’une prévention secondaire), divisés en 2 groupes : un groupe « contrôle » ne recevant aucun conseil diététique (1240 hommes au total) et un second groupe « intervention » soumis à un régime contrôlé en graisses (1227 hommes). La durée des essais était comprise entre 2 et 11 ans. Les auteurs de la méta-analyse se sont principalement intéressés à la mortalité totale et cardiovasculaire ainsi qu’au cholestérol sérique.
Les 6 études montraient qu’une alimentation contrôlée en lipides et en acides gras saturés n’avait pas d’influence significative, ni sur la mortalité totale (30,2% de mortalité dans les groupes « intervention » contre 29,8% dans les groupes « témoin »), ni sur la mortalité cardiovasculaire (16,8% de décès dans les groupes d’intervention contre 17,4% dans les groupes contrôles).
Le cholestérol sérique avait pourtant significativement plus diminué dans les groupes « intervention » (-12,6%) comparés aux groupes témoins (-6,5%). Cette observation questionne donc également la relation entre cholestérol sérique et développement des maladies cardiovasculaire puisque la mortalité était identique.
Les auteurs de l’étude concluent que la recommandation de diminuer les apports en lipides et acides gras saturés par les comités d’experts américains et anglais n’avait pas lieu d’être et n’aurait tout simplement pas due être mise en place.
Pour mémoire, en France, les Apports Nutritionnels Conseillés en lipides qui avaient été établis en 2001 ont été révisés et assouplis en 2010 par un groupe de travail de 17 experts. La part des lipides a été rehaussée, passant de 30 à 35% de l’apport énergétique total, tandis que la part des acides gras saturés totaux passait de 8 à 12%. Il n’y a donc aucune raison de stigmatiser les acides gras saturés ou les aliments qui en contiennent. |
Harcombe Z, S Baker J, Cooper S et col. (2015) Evidence from randomised controlled trials did not support the introduction of dietary fat guidelines in 1977 and 1983: a systematic review and meta-analysis, Open Heart ; 2:e000196. Doi:10.1136/openhrt-2014-000196