Une intervention réalisée en France montre que la distribution de chèques alimentaires à des populations en situation de précarité peut favoriser les achats alimentaires guidés par le plaisir et la santé, ainsi qu’une consommation de fruits et légumes variés, et ce, principalement au sein des foyers avec enfants.
Dans l’objectif de permettre aux populations en situation de précarité alimentaire d’accéder à une alimentation plus saine et durable, une équipe de recherche française a mis en place une intervention basée sur la distribution de chèques alimentaires ciblés sur les fruits, les légumes et les légumineuses. Concrètement, les participants, recrutés via des structures d’accompagnement social (épicerie sociale, centre communal d’action sociale), ont bénéficié pendant trois mois et demi de ces chèques, utilisables en supermarchés et d’un montant permettant l’achat de 5 portions quotidiennes de fruits et légumes et de 2 portions hebdomadaires de légumineuses pour chacun des membres du foyer. Les ressentis, les critères de choix alimentaires et les modifications des habitudes ont été recueillis auprès de 27 participants via des entretiens semi-directifs.
Les auteurs soulignent tout d’abord le fait que l’intervention a globalement été bien acceptée et appréciée par les participants. En effet, près de 75 % des utilisateurs des chèques ont évalué l’intervention avec une note supérieure à 8/10 et n’avaient pas de commentaires négatifs à apporter. Quelques participants (5) ont relevé des situations au cours desquelles ils ont ressenti une stigmatisation ou de la honte, mais la majorité des personnes ont considéré l’utilisation des chèques alimentaires plus digne que la fréquentation des banques alimentaires ou des épiceries sociales. A noter que plus de la moitié des participants ont rapporté des usages impropres des chèques alimentaires, c’est-à-dire en dehors des aliments ciblés initialement : fruits, légumes et légumineuses.
Concernant les effets de l’intervention sur les choix alimentaires, les auteurs distinguent deux catégories d’utilisateurs :
- les femmes avec enfants ainsi que les participants conscients d’un décalage entre leurs valeurs et leurs habitudes alimentaires. Ces participants (environ 2/3 de l’échantillon total) ont moins basé leurs choix alimentaires sur le prix et la familiarité qu’à l’accoutumée ; ils ont privilégié, à la place, le plaisir et la santé. Ils rapportent majoritairement une augmentation de la diversité et de la quantité de fruits et légumes consommés, alors que très peu soulignent une modification à la hausse des légumineuses. Les participants de cette catégorie expliquent également le fait que les chèques alimentaires leur ont permis de faire des économies pour acheter plus de viande ou de poisson.
- les participants vivant sans enfant et ceux n’ayant pas de ressenti d’insécurité alimentaire. Dans cette catégorie, les utilisateurs n’ont pas présenté de motivation spécifique pour mettre en place des changements dans leur alimentation. Ils n’ont pas rapporté d’effets majeurs de l’intervention sur leurs choix alimentaires, leurs critères de choix principaux restant le prix et la familiarité. Dans cette population, les chèques alimentaires ont surtout été perçus comme un moyen de stabiliser le budget alimentaire.
A noter que les critères de choix « naturalité », « éthique » ou encore « impact environnemental » n’ont pas été plus valorisés par les participants grâce à l’intervention. En conclusion, cette intervention basée sur la distribution de chèques alimentaires a contribué à stabiliser le budget « fruits et légumes » de l’ensemble des participants et a permis à une partie d’entre eux de faire des choix alimentaires guidés par le plaisir et la découverte de nouveaux fruits et légumes auxquels ils n’ont pas accès habituellement.
VERDEAU, B. DENIEUL-BARBOT, A. & MONNERY-PATRIS, S. Acceptability and effect on food choices of incentives promoting more sustainable diets among low-income consumers: A qualitative study. Appetite, 2025, 107903, doi: 10.1016/j.appet.2025.107903.